Questions de droit

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RVRESIDENT
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Questions de droit

Post by RVRESIDENT »

VonHunter wrote:Sciences po, de ce qu'on m'a dit, a un concours assez difficile pour ceux sortant du lycée.
Il est possible de faire dans certains facs une filière pour le préparer.

Mais sinon je recommande tout de même les études de droit. Et pour vous donner envie, voici vous pouvez lire cet arrêt ICI, dont la magnifique rédaction tente de cacher l'absurde raisonnement de la Cour de cassation (dont le paroxysme de l'absurdité sera atteint par un certain arrêt du 17 novembre 2000, où la Cour de cassation est obligée de casser une nouvelle fois, car la Cour d'appel de renvoi, c'était "rebellée" à juste titre).
Mais bon rassurez vous, si le petit Nicolas a foutu un sacré bordel bien malgré lui, toutes les affaires ne sont pas aussi complexes. Mais ça donne envie d'étudier le droit ^^

Perso je ne vois pas où est le problème dans cet arrêt. Je serai parvenu à la même conclusion. Le centre médical n'a qu'à faire correctement son job...
Me semble l'avoir étudié en première année.

EDIT de Unas : sujet extrait depuis le sujet Blabla
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VonHunter
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Re: Blabla (Envie de nouvelles interviews ? Go "Vos procès")

Post by VonHunter »

RVRESIDENT wrote:Perso je ne vois pas où est le problème dans cet arrêt. Je serai parvenu à la même conclusion. Le centre médical n'a qu'à faire correctement son job...
Me semble l'avoir étudié en première année.
Cet arrêt de 1996 est absurde pour plusieurs raisons, et je vais les rappeler rapidement:
1) Il existait un contrat entre Mme Perruche et son médecin, et entre Mme Perruche et le laboratoire. Dès lors, Mme Perruche pouvait engager leur responsabilité contractuelles pour les fautes qu'ils ont commises, et demander la réparation de son préjudice.
2) En revanche, il n'y avait AUCUN lien contractuel entre le petit Nicolas (l'enfant né handicapé) et le médecin et le laboratoire. Il était donc dès lors tiers aux contrats formés par sa mère entre elle et le médecin, et entre elle et le labo.
3) L'article 1147 du code civil visé en l'espèce par la Cour de cassation concerne la responsabilité civile contractuelle. Or, un tiers à un contrat n'a PAS d'action en responsabilité contractuelle, quand bien même il subirait un préjudice en raison de l'inexécution du contrat, il a tout au plus une action en responsabilité délictuelle (l'action en responsabilité contractuelle existe par exception pour les chaines de contrats translatifs de propriété néanmoins).
4) en tout état de cause, il n'y a de toute manière aucun lien de causalité entre les fautes commises et le handicap de l'enfant dont la cause exclusive est la rubéole. L'enfant ne subi donc pas un préjudice en lien de causalité avec les fautes commises.


Pour autant, après l'arrêt de 1996, la Cour d'appel de renvoi refusa d'appliquer à juste titre le droit dit par la Cour de cassation, en considérant que l'enfant ne subissait pas un préjudice indemnisable en relation avec les fautes commises. Résultat, nouveau pourvoi en cassation, avec cet arrêt du 17 novembre 2000 rendu par la Cour de cassation assemblée plénière (voir ICI), au visa des articles 1165 et 1382 du code civil, et qui a créé le tollé:
Attendu, cependant, que dès lors que les fautes commises par le médecin et le laboratoire dans l'exécution des contrats formés avec Mme X... avaient empêché celle-ci d'exercer son choix d'interrompre sa grossesse afin d'éviter la naissance d'un enfant atteint d'un handicap, ce dernier peut demander la réparation du préjudice résultant de ce handicap et causé par les fautes retenues ;
En tout état de cause, les fautes commises par le médecin et le laboratoire n'ont PAS généré le handicap du petit Nicolas. La cause exclusive du handicap est la rubéole attrapée par sa mère, pendant sa grossesse et de manière naturelle.
Il faut ajouter à cela que l'handicap de l'enfant était inévitable: quand bien même le médecin et le labo n'auraient pas fait d'erreur, l'enfant serait né handicapé...
Mais l'absence de leur erreur aurait permis à la mère d'interrompre sa grossesse: autrement dit le seul moyen d'éviter le handicap de l'enfant était qu'il ne naisse pas. Autrement dit, les fautes commises ont permis la naissance de l'enfant, c'est à dire sa vie, ce qui est évidement irréparable! Donc de lien de causalité, il n'y a pas. Or, la preuve d'un lien de causalité est une des trois conditions indispensables pour engager la responsabilité civile délictuelle d'une personne. Donc là encore, on peut affirmer sans l'ombre d'un doute que l'enfant ne subi pas un préjudice en relation de causalité avec les fautes commises. Comme l'a dit le professeur Mazeaud, on a une "indemnisation sans préjudice" (voir ICI).

Tout au plus ceux qui défendent l'arrêt perruche rendu par l'assemblée plénière, ne font que tenter d'étirer l'action en responsabilité contractuelle qu'avait la mère, pour former une sorte d'action hybride dont pourrait se prévaloir l'enfant. Mais cela ne tient pas... Pire, certains pour tenter de justifier leur raisonnement fallacieux disent partir d'une idée du "juste", et vérifient ensuite que cette idée puisse juridiquement se justifier. Et par quelques tours bien douteux, arrivent à la conclusion que c'est justifié, ce qui évidement est faux.

Bref, si les arrêts Perruche partaient d'une bonne intention de la Cour de cassation, à savoir indemniser l'enfant pour qu'il puisse avoir une vie décente, ils sont en revanche juridiquement absurdes. Il ne faut pas confondre le Droit avec une pseudo idée du juste.
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RVRESIDENT
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Re: Blabla (Envie de nouvelles interviews ? Go "Vos procès")

Post by RVRESIDENT »

Autrement dit, les fautes commises ont permis la naissance de l'enfant, c'est à dire sa vie, ce qui est évidement irréparable! Donc de lien de causalité, il n'y a pas.
C'est vrai que si on se base uniquement sur l'article 1147 (responsabilité contractuelle), c'est critiquable (il est minuit, j'ai même pas regardé le visa hein u_u ) étant donné l'inexistence de relations contractuelles entre l'enfant et le centre, certes.
Mais si on se base sur 1382, et qu'on admet le lien de causalité (à savoir que si le centre médical avait fait son job correctement, l'enfant ne serait pas né et n'aurait pas eu à connaître de souffrance), et bien ça colle selon moi. Depuis quand doit on évaluer la "réparabilité d'un dommage" ? Vie comme décès sont irréparables. Pourtant, on indemnise en cas de décès.
Question de point de vue.

La cause médicale des souffrances est bien la rubéole, mais si le centre n'avait pas commis de faute, l'entière situation dommageable n'aurait jamais existé puisque l'enfant ne serait pas né.
Après, il existe notamment une disposition L114-5 : Nul ne peut se prévaloir d'un préjudice du seul fait de sa naissance.

Donc ouais. Juridiquement il peut y avoir à redire, mais de là a considérer la décision comme absurde, je pense pas.
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Re: Blabla (Envie de nouvelles interviews ? Go "Vos procès")

Post by VonHunter »

RVRESIDENT wrote: Après, il existe notamment une disposition L114-5 : Nul ne peut se prévaloir d'un préjudice du seul fait de sa naissance.
Vous mélangez tout et votre raisonnement est juridiquement faux.
Concernant l'article L114-5 que vous évoquez, ce n'est que la codification d'une certaine loi du 04 mars 2002 dite loi Kouchner, qui dans ses premiers articles a pu être considérée comme la loi dite "anti perruche".
Autrement dit l'article que vous m'évoquez est postérieur à l'arrêt Perruche du 17 novembre 2000, et avait surtout pour but de mettre fin à cette jurisprudence Perruche. Donc l'évoquer pour contrer l'arrêt Perruche est hors propos, il n'existait pas à l'époque. Et l'application immédiate de la loi "anti perruche" souleva surtout des problèmes pour les cas similaires à l'affaire perruche, et entraînera d'ailleurs deux condamnations de la France par la CEDH: arrêt Maurice c/ France et Draon c/ France.

Cela étant dit, revenons en à l'arrêt de 2000 qui lui se fonde sur la responsabilité délictuelle, et voyons pourquoi votre raisonnement est juridiquement faux.
RVRESIDENT wrote:Depuis quand doit on évaluer la "réparabilité d'un dommage" ? Vie comme décès sont irréparables.
Faux! La Cour de cassation, avait déjà considérée elle même que la vie d'un enfant à elle seule ne constituait pas un préjudice réparable, voir notamment un arrêt du 25 juin 1991 ICI:
" l'existence de l'enfant qu'elle a conçu ne peut, à elle seule, constituer pour sa mère un préjudice juridiquement réparable, même si la naissance est survenue après une intervention pratiquée sans succès en vue de l'interruption de la grossesse ; que l'arrêt attaqué relève que l'enfant était parfaitement constitué et retient que Mlle X... ne prouvait pas que la naissance ait été pour elle la cause d'une souffrance morale certaine et se bornait à faire état de difficultés probables dans sa vie de jeune fille et ses perspectives d'avenir"
Elle n'est jamais revenue sur cette jurisprudence, et ne comptait d'ailleurs absolument pas le faire avec les arrêts Perruche. C'est d'ailleurs pour cela, que l'Assemblée plénière dans son arrêt rendu le 17 novembre 2000 (au visa de 1382 cette fois ci) tente de dissocier le préjudice de l'enfant, de la naissance de celui ci "ce dernier peut demander la réparation du préjudice résultant de ce handicap et causé par les fautes retenues"

Par sa formule, on pourrait croire là encore, que le préjudice réparé est, certes non pas la naissance en elle même, mais toutes les difficultés que rencontrera l'enfant (notamment le coût de ses soins), et que celui-ci a été causé par les fautes du médecin et du laboratoire.
Mais c'est parfaitement faux. Analysons le lien de causalité:
1) nous savons que la cause exclusive du handicap de l'enfant est la rubéole attrapée naturellement par la mère;
2) la mère avait formé de contrats avec un médecin et un laboratoire, afin de savoir si elle avait attrapée ou pas la rubéole, et si c'était positif, avait en tout état de cause manifesté sa volonté d'interrompre sa grossesse.
3) il n'y avait aucun moyen d'éviter le handicap de l'enfant, quand bien même le médecin et le laboratoire n'auraient pas manqué à leur obligation contractuelle respective.
RVRESIDENT wrote:La cause médicale des souffrances est bien la rubéole, mais si le centre n'avait pas commis de faute, l'entière situation dommageable n'aurait jamais existé puisque l'enfant ne serait pas né.
"L'enfant ne serait pas né": c'est bien là le problème, et c'est là que votre raisonnement est scandaleux. Cela reviendrait finalement à dire qu'il valait mieux pour l'enfant de ne pas naître, et finalement, que sa vie a moins de valeur que celle d'une personne "normale". C'est exactement ce type de raisonnement douteux qu'on a tenté d'imputer à la Cour de cassation, alors même qu'elle n'a jamais prit le problème sur ce terrain là! D'ailleurs ceux qui tentent de défendre habilement cet arrêt, n'iront jamais, ô grand jamais, dire ce que vous avez dit. Ce que vous faite reviendrait finalement par extension à reconnaître un droit de ne pas naître, ce qui est là encore évidement inadmissible.

Il y aurait un lien de causalité certain, si le handicap de l'enfant, même causé par la rubéole, aurait pu être évité par un traitement avant sa naissance, car dans ce cas là, l'enfant aurait perdu la chance de naître sans son handicap source de préjudices pour lui, et cette perte de chance aurait été en lien de causalité direct avec les fautes commises par le médecin et le laboratoire. Mais tel n'est pas le cas en l'espèce.
RVRESIDENT wrote:Pourtant, on indemnise en cas de décès.
Oui, si un lien de causalité existe entre les fautes commises et le décès...
Or, le problème de l'arrêt Perruche est justement le défaut de lien de causalité entre les fautes commises et le dommage subi par l'enfant. D'où l'expression "indemnisation sans préjudice" utilisée par le professeur Mazeaud...
RVRESIDENT wrote:Juridiquement il peut y avoir à redire
Nous rappellerons que le Droit apporte des solutions qui doivent se tenir juridiquement, et qu'il vaut mieux parfois apprécier les situations in abstracto, plutôt que in concreto, afin de prendre la meilleure décision juridique possible, peu importe qu'elle puisse sembler "injuste".
Le minimum syndical pour un juriste, et plus particulièrement pour les conseillers travaillant à la Cour de cassation, c'est de rendre des solutions qui se tiennent juridiquement, et non une sorte de bricolage absurde juridiquement pour tenter d'atteindre un pseudo idéal, étranger aux raisonnement juridique.
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Post by Sheikor »

En quoi un "droit de ne pas naître" serait-il inadmissible ?
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Re: Blabla (Envie de nouvelles interviews ? Go "Vos procès")

Post by RVRESIDENT »

Et l'application immédiate de la loi "anti perruche" souleva surtout des problèmes pour les cas similaires à l'affaire perruche, et entraînera d'ailleurs deux condamnations de la France par la CEDH: arrêt Maurice c/ France et Draon c/ France.
J'avais complétement que cet article était issu de 2002. J'ai peut être oublié de le noter, je devrai rejeter un œil...
Mais c'est son caractère rétroactif qui a fait débat devant la CEDH. Certains se sont vu reprendre leur indemnisation.
La CEDH a condamné la France au motif qu'on avait porté atteinte à leur patrimoine, c'est tout.

Sheikor wrote:En quoi un "droit de ne pas naître" serait-il inadmissible ?
C'est justement ce point que j'essaie de défendre. On a tout le droit de choisir de mourir, alors pourquoi ne pas de choisir de ne pas naître ? Si J'avais été dans cette situation, que j'étais l'enfant malade, j'aurai certainement supplié pour ne pas naître. Chose qui aurait pu être évitée si les médecins avaient fait leur travail.
On a tous le droit à une vie heureuse. Mais une vie destinée à la souffrance en vaut selon moi pas la peine d'être vécue. Après, aux juges de chercher comment indemniser ça.


De plus, dans ton arrêt du 25 juin 1991, je l'ai aussi sous les yeux, mon prof nous en a parlé : l'existence de l'enfant qu'elle a conçu ne peut, à elle seule, constituer pour sa mère un préjudice juridiquement réparable, même si la naissance est survenue après une intervention pratiquée sans succès en vue de l'interruption de la grossesse ; que l'arrêt attaqué relève que l'enfant était parfaitement constitué et retient que Mlle X... ne prouvait pas que la naissance ait été pour elle la cause d'une souffrance morale

Or, ici, dans l'affaire Perruche, le demandeur agit au nom du préjudice de son enfant, pas de celui des parents. Et il me parait difficilement concevable que l'enfant ne souffre pas tant physiquement que moralement du fait de sa naissance.



Bref, deux points posent réellement selon moi :
- L'application de 1147 (car je suis d'accord sur l'absence de liens contractuels entre l'enfant et le centre, rien à redire)
- Ce fichu lien de causalité que visiblement la doctrine s'évertue à dire inexistant. Moi, je suis tout à fait de l'avis qu'on peut avoir le droit de ne pas naitre. Si cette naissance a entrainé une situation préjudiciable, (à savoir rubéole et souffrances), je pense suis d'avis qu'il y a existe du lien de causalité entre la faute du centre, et la souffrance. L'un a clairement permis en l'espèce, l'existence de l'autre. La cause du dommage n'est pas EXCLUSIVEMENT, la rubéole.
Faute des médecins => Naissance de l'enfant malade => Souffrance

Après, je vais pas débattre d'avantage. je suis loin d'être une lumière, Mazeaud s'y connais mieux que moi (vive Félix Rome :P ).
Le boulot du juriste, c'est d'innover. Pas de se cantonner sur les règles existantes. On stagnerait sinon. Et la Cour de Cassation l'a bien compris.

De toute façon, le débat est clos, la loi Kouchner a corrigé cette solution.
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Re: Questions de droit

Post by Unas »

RVRESIDENT wrote:Le boulot du juriste, c'est d'innover. Pas de se cantonner sur les règles existantes. On stagnerait sinon. Et la Cour de Cassation l'a bien compris.
J'aurais juré que dans les institutions actuelles de la République c'était le Parlement (ou le peuple par référendum, bien sûr) qui avait pour rôle d' "innover" et de faire évoluer les lois. C'est ce qu'on appelle le pouvoir législatif... Le juriste, il a un pouvoir judiciaire; il n'est censé "innover" que lorsqu'il y a un vide juridique, non ? :)
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Re: Blabla (Envie de nouvelles interviews ? Go "Vos procès")

Post by Kroki »

Existe-t-il seulement ce droit de mourir, vu qu'il n'est pas reconnu par la médecine française ? Et le bébé non-né est-il une personne morale pour possiblement avoir un droit ?
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Re: Questions de droit

Post by RVRESIDENT »

Unas wrote:
RVRESIDENT wrote:Le boulot du juriste, c'est d'innover. Pas de se cantonner sur les règles existantes. On stagnerait sinon. Et la Cour de Cassation l'a bien compris.
J'aurais juré que dans les institutions de la République c'était le Parlement (ou le peuple par référendum, bien sûr) qui avait pour rôle d' "innover" et de faire évoluer les lois. C'est ce qu'on appelle le pouvoir législatif... Le juriste, il a un pouvoir judiciaire; il n'est censé "innover" que lorsqu'il y a un vide juridique, non ? :)
Si c'était le cas, et que le pouvoir judiciaire n'avait aucune liberté, on serait dans une sacrée mouise vu les textes que le Parlement nous pond des fois (qui ne cesse de pondre des textes contradictoires ou inutiles dans un soucis de plaisir à l'électorat) ! Quand au référendum, c'était quand le dernier ? :awesome:
On ne peut pas se cantonner aux règles textuelles qui sont loin d'être parfaites et d'une clarté évidente pour certaines.On a besoin de faire évoluer et de préciser ses textes. Une solution peut donc être juridiquement contestable mais faire plus de bien que de mal. Ce que la doctrine semble parfois semble parfais ne pas prendre en compte.
Moi à leur place je me contenterai d'un "Ok, c'est ptet critiquable, mais au fond c'est utile donc tant pis.". Je me poserai pas de problème en fait...

Le législateur tient quand même compte de la jurisprudence dans certaines lois, donc y a de l'espoir.

Kroki wrote:Existe-t-il seulement ce droit de mourir, vu qu'il n'est pas reconnu par la médecine française ? Et le bébé non-né est-il une personne morale pour possiblement avoir un droit ?
Si je veux me saigner là de suite, je peux le faire. C'est mon droit. Après, les hôpitaux ont obligation de te prodiguer des soins (obligation de moyens cependant) donc ton droit s'oppose au leurs. Y a donc conflit difficile à résoudre !

Quant au bébé personne morale, c'est tout aussi compliqué. Y a pas de solution toute faite. Ça dépendra des points de vue... C'est comme ceux qui considère qu'on ne peut plus avorter après un certain temps car le fœtus est devenu un "être humain". D'autres pays laissent encore à ce stade la possibilité. Tout dépend simplement du point de vue. C'est plus du droit, c'est de la philosophie à ce stade :/
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Re: Blabla (Envie de nouvelles interviews ? Go "Vos procès")

Post by VonHunter »

Je vais reprendre points par points chacun de vos arguments.
RVRESIDENT wrote:
Sheikor wrote:En quoi un "droit de ne pas naître" serait-il inadmissible ?
C'est justement ce point que j'essaie de défendre. On a tout le droit de choisir de mourir, alors pourquoi ne pas de choisir de ne pas naître ? Si J'avais été dans cette situation, que j'étais l'enfant malade, j'aurai certainement supplié pour ne pas naître. Chose qui aurait pu être évitée si les médecins avaient fait leur travail.
Vous confondez deux choses: l'idée du droit de ne pas naître, et une réalité factuelle qui est celle de mort (que certains choisissent prématurément en se suicidant). Voyons pourquoi le raisonnement est faux.

Joignant votre réponse, à la question suivante posée par Kroki:
Kroki wrote:Et le bébé non-né est-il une personne morale pour possiblement avoir un droit ?
Sur l'idée (absurde) du droit de ne pas naître:
La première question à se poser est de savoir qui serait le titulaire de ce droit. Serait ce une personne? La réponse est ici négative, car le foetus n'est juridiquement pas une personne (ni physique, ni morale) en droit français. Or, un droit doit avoir pour titulaire une personne, donc accorder un droit à un foetus est donc juridiquement impossible.

Mais à supposer que vous vouliez "révolutionner" le droit français, et que vous admettiez que le foetus soit une personne, et qu'il puisse être titulaire d'un tel droit. Comment l'exercerait il? Lorsqu'il est dans le ventre de sa mère on lui demande son avis? Vous voyez bien qu'en ce sens, un tel droit est parfaitement absurde, et il reviendrait en réalité aux parents dudit foetus d'exercer ce droit au nom de leur enfant. Et là on se retrouve face à un énorme problème: ce droit de ne pas naître serait nécessairement subordonné au droit de la mère d'interrompre sa grossesse.
Prenons un exemple: supposez que le foetus risque de naître avec un grave handicap. Son père décide, en vertu d'exercer au nom de son futur enfant, le droit de celui-ci à ne pas naître: ainsi la mère, devrait en ce sens nécessairement avorter. Mais supposé encore, que la mère n'est aucune envie d'interrompre sa grossesse: on ne pourra en aucun lui forcer d'avorter, et à ce titre je vous rappelle l'article 16-1 du code civil, qui en ses alinéa 1 et 2 dispose que "Chacun a droit au respect de son corps. -Le corps humain est inviolable", et l'article 16-3 du code civil qui dispose que "Il ne peut être porté atteinte à l'intégrité du corps humain qu'en cas de nécessité médicale pour la personne ou à titre exceptionnel dans l'intérêt thérapeutique d'autrui. -Le consentement de l'intéressé doit être recueilli préalablement hors le cas où son état rend nécessaire une intervention thérapeutique à laquelle il n'est pas à même de consentir". Donc finalement le droit de ne pas naître de l'enfant, ne pourra pas être exercé, car il se heurtera aux droits de la mère.
Alors vous pourrez toujours me dire que vous souhaitez envisager ce droit de ne pas naître comme un droit de créance et rien d'autre. Mais là, qui en serait le débiteur? Vous me direz sans doute le médecin et le laboratoire dans l'affaire Perruche. Oui mais alors, dans une affaire où la mère parfaitement consciente que son enfant naîtra gravement handicapé, refuse d'interrompre sa grossesse, et donne naissance à un enfant très gravement handicapé. Celui-ci, aurait il dans ce cas là une action en responsabilité ouverte contre sa propre mère, du fait de sa naissance? Vous voyez bien que c'est juridiquement absurde, et pas seulement juridiquement d'ailleurs.
RVRESIDENT wrote:Mais une vie destinée à la souffrance en vaut selon moi pas la peine d'être vécue.
Ce que vous dites est une horreur, et pas seulement juridiquement. Vous êtes en train de dire que toutes les vies n'ont pas la même valeur. Peut être voulez vous expliquer ou quoi une vie n'aurait pas la même valeur qu'une autre?
RVRESIDENT wrote:On a tous le droit à une vie heureuse.
Dans l'absurdité juridique, vous atteignez là un niveau qu'il va être extrêmement difficile à concurrencer.
Le droit à la vie existe oui, mais le droit à une vie "heureuse" n'a jamais existé en lui même, et ne pourrait d'ailleurs pas exister.
Mais résonnons par l'absurde, et supposons qu'il existe. Comment le définirait t-on? Serait ce un droit de créance? Dans ce cas, qui serait le ou les débiteur(s)?
RVRESIDENT wrote:De plus, dans ton arrêt du 25 juin 1991, je l'ai aussi sous les yeux, mon prof nous en a parlé : l'existence de l'enfant qu'elle a conçu ne peut, à elle seule, constituer pour sa mère un préjudice juridiquement réparable, même si la naissance est survenue après une intervention pratiquée sans succès en vue de l'interruption de la grossesse ; que l'arrêt attaqué relève que l'enfant était parfaitement constitué et retient que Mlle X... ne prouvait pas que la naissance ait été pour elle la cause d'une souffrance morale

Or, ici, dans l'affaire Perruche, le demandeur agit au nom du préjudice de son enfant, pas de celui des parents. Et il me parait difficilement concevable que l'enfant ne souffre pas tant physiquement que moralement du fait de sa naissance.
L'arrêt concerne le préjudice qui serait dû à la naissance elle même. Peu importe qu'en l'espèce la mère est agi en son nom propre, et non en celui de son enfant. D'une part, parce qu'en ce qui concerne la mère, si c'est celle-ci avait eu un enfant né gravement handicapé elle aurait été indemnisé, ce qui était d'ailleurs le cas dans l'affaire Perruche (et qui n'est donc pas sujet à débat devant la Cour de cassation).
D'autre part, la cause des préjudices de l'enfant se trouve dans la naissance de celui-ci, autrement dit, cela signifierait que la naissance est un préjudice réparable. Ce qui n'est évidement pas le cas.
C'est d'ailleurs pour cela, que la Cour de cassation, notamment l'assemblée plénière dans son arrêt rendu le 17 novembre 2000, tente à tout prix par un jeu de formules habile, de faire croire (comme avait tenté de le faire la 1ère chambre civile dans son arrêt du 26 mars 1996), que le handicap ne résulte pas de la naissance, mais des fautes du médecin et du laboratoire. Mais nous savons parfaitement que c'est faux.
RVRESIDENT wrote:Le boulot du juriste, c'est d'innover. Pas de se cantonner sur les règles existantes. On stagnerait sinon. Et la Cour de Cassation l'a bien compris.
"Innover" certes, mais cela ne doit pas se faire sur des raisonnements absurdes, illogiques, et dénués de fondements juridiques.

Unas wrote:J'aurais juré que dans les institutions actuelles de la République c'était le Parlement (ou le peuple par référendum, bien sûr) qui avait pour rôle d' "innover" et de faire évoluer les lois. C'est ce qu'on appelle le pouvoir législatif... Le juriste, il a un pouvoir judiciaire; il n'est censé "innover" que lorsqu'il y a un vide juridique, non ?
Le Parlement avec l'inflation législative, a généralement prit la très mauvaise habitude de voter des loi obscures, et il revient aux juges de les interpréter.
Plus largement, le législateur vote des lois généralement assez large, à charge ensuite pour les juges de les appliquer à des cas concrets. Et là c'est le drame, car certaines lois en l'état sont inapplicables, et le juge est dès lors obligé de forger des normes jurisprudentielles sous le couvert de l'interprétation, soit pour compléter le texte, soit pour le rendre applicable.
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Re: Questions de droit

Post by RVRESIDENT »

J'ai l'impression en lisant tout ceci qu'on complexifie inutilement le problème.
On a tous droit a une vie heureuse, et c'était dit dans un sens purement philosophique, pas juridique.

On critique tous les jours le fait que la justice ne rend pas la justice. Ici on va se plaindre que c'est le cas. Ce genre de choses me révolte.
J'ai récolte aujourd'hui de nombreux avis qui vont dans le sens de : une vie de souffrance ne mérite pas d'être vécue.
Y a pas de valeurs entre les vies, juste une appréciation du bonheur qu'on en tirera.
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RVRESIDENT
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Re: Questions de droit

Post by RVRESIDENT »

Le droit, ce n'est pas que des textes. C'est aussi de la morale. Une justice tout simplement.
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Unas
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Re: Questions de droit

Post by Unas »

RVRESIDENT wrote:J'ai récolte aujourd'hui de nombreux avis qui vont dans le sens de : une vie de souffrance ne mérite pas d'être vécue.
Y a pas de valeurs entre les vies, juste une appréciation du bonheur qu'on en tirera.
Alors si on reste sur le plan "philosophique" et surtout moral de la question, puisque VonHunter a fait le tour de l'aspect légal, y'a plusieurs gros problèmes avec ce que tu dis :
  1. J'ai du mal à saisir le lien entre "avoir droit à une vie heureuse" et "avoir droit de ne pas vivre".
    La mort, pour moi, ce n'est pas franchement une vie heureuse. :|
  2. Comment évalues-tu si la vie de quelqu'un d'autre est heureuse ?
    Les gens ne ressentent pas tout pareil, leur bonheur ne vient pas toujours des mêmes choses. C'est à chacun de juger s'il est heureux ou non, je ne pense pas que quelqu'un d'autre puisse le décréter à sa place.
  3. Comment évalues-tu si une vie est heureuse ou non avant de l'avoir commencée ?
    Normalement, à la fin de sa vie, on peut essayer de faire un bilan en fonction des choses plus ou moins bonnes ou mauvaises qu'on a vécues et ressenti.
    Certes, il y a des cas plus extrêmes où, à un instant de sa vie, on ressent tellement de souffrance qu'on se donne la mort : c'est toujours prématuré (on se prive d'un avenir qu'on ne connait pas), mais on peut en comprendre la motivation.
    En revanche, quand on n'a absolument rien vécu, il me semble difficile de prévoir si on sera heureux ou non, quel que soit le handicap.

Ton problème, c'est que tu as l'air convaincu que le handicap est une souffrance insurmontable et qu'il empêche totalement d'être heureux. Je ne vois pas ce qui te permet d'être si catégorique : certes, le syndrome de Gregg que vous évoquez est très grave et cause des souffrances physiques, mais il n'empêche pas la relation aux autres par exemple. Si la personne est bien entourée et aimée il n'y a pas d'impossiblité à ce qu'elle soit heureuse malgré tout.

Dans le même ordre d'idée, la petite référence culturelle qui va bien : le film Intouchables met en scène un tetraplégique - lui aussi, atteint d'un handicap très grave source de souffrances physiques - qui, au début, semble prendre la vie comme pesante, puis, au contact de l'autre, finit par y trouver une réelle joie. Aurait-il mieux valu qu'il se suicide au début du film ?
Et le film est adapté d'une histoire vraie, ce n'est pas juste du cinéma...
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RVRESIDENT
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Re: Questions de droit

Post by RVRESIDENT »

Soit. Je m'avoue vaincu x)
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Naceat
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Re: Questions de droit

Post by Naceat »

RVRESIDENT wrote:Le droit, ce n'est pas que des textes. C'est aussi de la morale. Une justice tout simplement.
:)
(C'est pour dire que je suis d'accord avec tes arguments en fait. XD)
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